Gabon: Retour triomphal d’Ali Bongo
Après trois mois d’hospitalisation au Maroc, le chef de l’Etat gabonais retrouve un pays où son absence a nourri les commentaires les plus tendancieux et laissé libre cours à des ambitions ascensionnelles.
Il y a des jours à Libreville, comme celui du 23 mars dernier, qui valent la peine d’être vécus. Surtout quand le personnage majeur du triomphe d’un retour au pays natal qui s’écrit à grands traits à l’aéroport international Léon Mba est le locataire-en-chef du Palais de bord de mer. Ali Bongo Ondimba (Abo) apparait à ses concitoyens comme on entre dans une histoire de résurrection : la démarche tatillonne et la canne sur laquelle il s’appuie sont les immédiats clichés révélateurs d’un accident vasculeux cérébral (Avc) qui l’a cloué dans le lit d’un hôpital marocain trois mois durant. La déception est donc énorme dans les milieux du Bongo bashing où Abo avait déjà été aperçu arpentant les vallées de l’ombre de la mort, et qui entonnaient déjà l’antienne de la vacance du pouvoir. Et pourtant, les Gabonais, à qui les publications mensongères des réseaux sociaux annonçaient le terrible état de dégénérescence mental dans lequel avait plongé leur Chef d’Etat, ont vu le patron de l’exécutif gabonais marchant de ses deux pieds et accomplissant chacune des exigences protocolaires depuis le bas de la passerelle jusqu’au bain de foule.
Abo revient de loin, de très loin d’ailleurs : c’est le 24 octobre 2018 que le président de la République gabonaise est victime d’un Avc. Il est à Riyad, en Arabie saoudite, quand lui arrive cet accident qui lui imposera un détour au Maroc où va l’accueillir Mohammed VI, le souverain chérifien. A son chevet, une mobilisation des expertises les plus reconnues en tête desquelles le Professeur Abdelaziz Mâaouni, Chef de Département et enseignant de médecine interne à la Faculté de médecine de Rabat, mais aussi médecin personnel du roi. Mais le premier des Gabonais est un dur à cuire que même la maladie n’éloigne pas durablement de son fauteuil présidentiel : dans la nuit du 25 février, Abo avait reçu plusieurs responsables politiques en audience au palais présidentiel de Libreville. Un mois plutôt, il était le témoin de la prestation de serment du nouveau gouvernement piloté par Julien Nkoghé Békalé. Son visage réapparaitra plus tard au Maroc où une ministre prêtait serment en mi – février dans les murs de l’ambassade du Gabon à Rabat en présence de la Cour constitutionnelle qui avait fait le déplacement.
Tout va donc pour le mieux et – il a la force d’y croire – dans le meilleur des Gabons. Un conseil des ministres, six jours après son retour, rétablira une sérénité jadis perturbée par des chacals qui attendaient la mort du chef pour danser sur sa chaise et profaner son sceptre : le 6 janvier, le lieutenant Kelly Ondo et d’autres soldats de la sécurité présidentielle avaient envahi les studios de l’Office de radiodiffusion et de télévision du Gabon (Ortg) depuis lesquels ils avaient annoncé un « rétablissement de l’ordre institutionnel bafoué par une absence d’autorité à la tête de l’Etat ».